Xerfi Canal présente l'analyse d'Aurélien Duthoit, Directeur d'études Xerfi Global
La crise et les options d'ajustement des pays sont en train de rebattre les cartes de la compétitivité et de bouleverser la géographie industrielle à travers le monde. Face à la montée des pays émergents, la stagnation et la régression relative de l'industrie semblaient inscrites dans les gènes des pays développés.
Le processus de divergence a probablement atteint ses limites et bute sur ses contradictions internes. On ne peut croître éternellement au détriment des autres sans remettre en cause la solvabilité de ses marchés. Le ralentissement mondial de 2012 est le fait d'une double contradiction : La première, celle de l'Europe, dont la désagrégation industrielle à la périphérie pénalise la dynamique d'ensemble. La seconde, celle des pays émergents dont la croissance extravertie bute sur une crise de débouchés.
Une convergence se dessine, mais malheureusement elle se fait en partie par le bas. Au sein de ce mouvement, des stratégies de reconquête très inégales s'affirment au sein des pays développés, avec des gagnants et des perdants. 2013 et 2014 seront des années décisives. C'est la soutenabilité du modèle de croissance mondiale qui se joue. Du côté des pays émergents, le mouvement de rattrapage est loin d'être épuisé. Mais ils n'échappent pas au risque de crise de surproduction transitoire. Car le recentrage sur des moteurs interne de croissance reste encore ténu. Du coup, ils demeurent exposés à la conjoncture mondiale. Si l'on prend le cas de la Chine, le passage à vide de la croissance mondiale en 2012 a dégradé les bilans des entreprises. Un tournant s'opère aujourd'hui. La part de l'investissement, notamment en infrastructure, croît. Le marché obligataire s'ouvre, mais la consommation ne prend toujours pas le relai et la reprise qui se dessine est à nouveau portée par les exportations.
[A4] Plus inquiétant, le Brésil tente aussi de reprendre la main mais par le change et la taxation des importations, pas de dynamique soutenable en vue donc. En Europe, la divergence industrielle reste à l'œuvre. L'Allemagne, et plus largement le Nord de l'Europe renforcent leur position. Les marges élevées des entreprises alimentent la divergence sur un mode cumulatif. Le sud, lui, s'enfonce, et la France, elle, reste en apesanteur. Ce mouvement de polarisation est néanmoins en passe de s'atténuer. Le Sud joue à fond la désinflation salariale et immobilière interne. Le Royaume-Uni joue la concurrence fiscale et bénéficie de son change flexible. Un rééquilibrage en leur faveur pourrait s'amorcer via les investissements directs. La France est, elle, prise en étau et les ajustements nécessaires à sa réindustrialisation sont devant elle. Seuls les Etats-Unis ont véritablement enclenché une dynamique de reconquête industrielle. Les leviers son connus : La compression des salaires. Une politique de soutien public via certains avantages fiscaux. Une baisse des prix énergétiques grâce au développement des gaz de schiste. Une dépréciation du change. Les résultats sont là et les groupes rapatrient leurs profits et les réinvestissent sur le territoire comme l'indique la balance des revenus vis-à-vis de l'étranger. Les Etats-Unis pourront-ils longtemps faire cavalier seul ? Leur reprise industrielle va-t-elle remorquer l'Europe ? C'est tout l'enjeu des deux années à venir.
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