Par Thibaut de Jaegher - Publié le 09 juillet 2012, à 13h28
Social, Politique industrielle, production industrielle, EditoPour la première fois, l’industrie est le sujet d’un sommet social. Et pas seulement parce que la conférence, qu’organise aujourd’hui et demain le gouvernement au conseil économique et social, traite de redressement productif mais également parce que dans toutes les autres tables rondes c’est bien de production -de richesses- dont il sera question. Comme nous le confiait Mohamed Oussedik, le secrétaire confédéral à l’industrie de la CGT, « lorsque l’on parle de protection sociale, d’emploi, de compétences, au fonds, on parle d’industrie ».
Cette mise en avant des « producteurs » est logique. Ce secteur est à un moment charnière de son existence. Jamais nous n’avons autant parlé d’industrie. Il suffit de se souvenir de la campagne présidentielle et du fait qu’aucun candidat n’a fait l’impasse sur les usines. Ou qu’aucun éditorialiste ne s’est senti autorisé à passer sous silence la question de la désindustrialisation.
L’industrie, qui a vu sa part dans la valeur ajoutée du pays chuter de 16,9% à 12,5 % en dix ans tout en perdant 775 000 emplois, a donc une chance historique de faire passer ses idées. L’exécutif mis en place par François Hollande est à la fois volontariste et à l’écoute des chefs d’entreprise. Il semble décider à mettre en place une nouvelle stratégie industrielle pour la France en nouant un pacte POUR l’industrie avec toutes les forces vives de la nation : les entreprises, les salariés, les corps intermédiaires, les collectivités locales. "Le redressement productif, c’est un projet pour le pays entier", affirmait récemment Arnaud Montebourg dans l’entretien qu’il a accordé à L’Usine Nouvelle.
Ce pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, comme l’appelle le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, il reste à définir, et ce sera l’objet de la conférence sociale. Mais l’on connaît déjà les valeurs que François Hollande veut retrouver dans cette nouvelle donne industrielle : de la vision, de l’ambition et de la stabilité.
Sur la vision, d’abord. Le président entend proposer une perspective à 20 ans aux industriels. Pour cela, il s’appuiera sur l’ex-grand emprunt mais pas seulement. Il désire aussi mettre le paquet sur des secteurs qu’il considère comme stratégiques : le numérique, la santé et la transition énergétique. Dans tous ces domaines, ils veulent faire émerger des champions français, et européens.
Sur l’ambition, ce qu’il veut c’est promouvoir un plan de Reconquête industrielle, plan qu’Arnaud Montebourg doit présenter dans les prochains jours. Les détails n’en sont pas encore connus mais quelques piliers commencent à apparaître. La Banque publique d’investissement sera sans doute le cœur du réacteur avec pour mission de financer « l’économie réelle ». Le livret d’épargne industrie devrait permettre de mobiliser l’épargne populaire autour des usines. Sur la fiscalité, l’impôt sur les sociétés devrait être désormais modulé selon la taille de l’entreprise (15 % pour les TPE, 30 % pour les PME, 35 % pour les grands groupes). Le gouvernement devrait aussi accepter des transferts de charges (la CSG plutôt que la TVA). Sur le plan légal, on devrait y trouver aussi l’interdiction de fermer une usine rentable.
Ce plan de reconquête ne fonctionnera pas seul. Il devrait aussi servir de « chapeau » à des mesures plus ciblées. Un plan automobile d’urgence va ainsi être révélé cette semaine pour venir au secours de cette filière en difficulté. Et, à l’automne, un plan PME marquera l’attention particulière que le gouvernement veut porter aux plus petites sociétés.
Toutes ces mesures, dont les détails restent à préciser, montrent bien le volontarisme nouveau du gouvernement en matière industriel. Il a semble-t-il pris conscience que la France ne souffrait pas seulement d’un déficit public trop important mais également d’un déficit productif. Et c’est une chance pour l’industrie.