Temps de lecture estimé : 6 minutes
Le mot « entrepreneur » est tellement à la mode qu’il en est déjà devenu ennuyeux à lire. Toute nouvelle entreprise est un projet d’entrepreneuriat, ce qui est d’autant plus criant si des jeunes la dirigent, et les endroits où l’on peut lire des recommandations et des conseils adressés àl’entrepreneur qui entreprend sont nombreux. J’ai donc opté aujourd’hui pour une approche inverse : je vous propose cinq conseils simples et pratiques pour mener votre entreprise à la ruine de façon rapide et efficace.
Vous n’avez pas besoin d’être jeune et entrepreneur pour cela : votre entreprise peut très bien être solidement établie, si vous vous appliquez vraiment, vous pouvez la couler en un clin d’œil.
Voici comment faire.
- Sous-estimer la valeur de la communication. Négliger la transmission de ses messages, s’avérer incapable de communiquer ses valeurs, ses objectifs, son enthousiasme, garder les informations pour soi ou pratiquer un semblant de transparence, ne parler que de ceux extérieurs à l’entreprise sans écouter l’opinion de ceux qui sont dedans ou sans s’efforcer à ce qu’ils se sentent valorisés et fiers de leur travail… Ce ne sont là que quelques-unes des exemples de la vie quotidienne dans les sociétés qui croient que la communication est secondaire et indépendante de leur cœur de métier, dans laquelle il ne faut investir qu’en situation de crise pour lancer une campagne de publicité.
- Être rigide. Beaucoup d’entreprises pensent qu’être fidèles à ses principes est synonyme de rigidité, alors que c’est plutôt tout le contraire. Si nous ne sommes pas en mesure d’être suffisamment souples pour s’adapter aux changements, nous courons le risque de tomber au premier assaut. La rigidité signifie entre autres négliger la formation de chacune et chacun de ses employés, maintenir des structures excessivement hiérarchiques et peu fonctionnelles, ne pas tenir compte de la critique constructive ou de l’adversité pour renforcer nos faiblesses, croire que son seul but est la vente et obtenir un bénéfice économique en oubliant que cela doit en fait être la conséquence d’une bonne gestion.
- Ne pas susciter l’émotion. Que serait le monde sans émotion, sans rêve, sans enthousiasme ? Nous avons tous des rêves, mais pour qu’ils deviennent réalité, nous devons savoir les communiquer. Cela suppose partager ses préoccupations, les rendre compréhensibles par son public et, bien au-delà encore, l’impliquer sur le plan émotionnel. Les rêves ont tendance à être des objectifs difficiles à atteindre et s’avèrent parfois utopiques. Mais en s’assurant que ses employés, ses clients, ses collaborateurs les intègrent et sentent en faire partie, ces acteurs apporteront leur grain de sable à l’édifice pour atteindre ces objectifs, souvent sans même s’en rendre compte eux-mêmes.
- Dénigrer la concurrence. En mettant toute son énergie dans les trois premiers points, vous aurez probablement réussi à établir une entreprise avec un degré élevé de conscience de sa propre nature – même si cela semble exagéré, de nombreuses entreprises ne connaissent même pas leur raison d’être – ce qui contribue à une estime de soi collective élevée et une fierté sans faille de ce que l’on est. Cette étape est cruciale et très saine, à condition de toujours la prendre avec l’humilité. Hors, il ne faut jamais sous-estimer la concurrence, pour autant que l’on croit que sa stratégie ne convient pas, que ses dirigeants sont peu qualifiés, que la pensée de l’entreprise est absurde, etc. Au lieu de perdre son temps à sermonner sur ses défauts, il suffit de regarder plutôt les différences et tenter d’apprendre des autres pour améliorer certains de ses propres aspects que, en s’appuyant sur une perspective totalement différente, il aurait été difficile d’imaginer.
- Manquer de sens de l’humour. Mon dernier conseil pour couler une entreprise de manière rapide et efficace est l’absence la plus absolue de sens de l’humour. Une personne peut se satisfaire plus ou moins de son travail, mais ce qui est sûr, c’est qu’à aucun moment ce dernier ne doit tourner au tourment quotidien. Les structures qui savent rire d’elles-mêmes et qui acceptent que l’humour améliore les performances et le sentiment d’appartenance construisent des liens solides entre les travailleurs, ce qui se traduit par de meilleurs résultats à la fin du mois. Mais si le but est d’avoir une entreprise avec une atmosphère raréfiée, où la tension est palpable à la moindre adversité et où les individus ne se sentent pas à leur place, il suffit d’imposer la sévérité et l’intransigeance pour constater par soi-même à quel point la désertion se fera en très peu de temps.
Sandra Bravo est membre fondatrice de BraveSpinDoctors, cabinet de conseil en communication stratégique et en marketing politique.