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Ils ne gèrent pas de façon adéquate cette crise. Jusqu'à aujourd'hui, ils se sont uniquement limités à des mesures afférant au domaine financier. Aux Etats-Unis, la Réserve fédérale a lancé un troisième cycle d'assouplissement quantitatif, alors qu'il y a déjà un excès de liquidités en dollars et que les taux d'intérêt sont très bas.
L'administration américaine ferait mieux de s'attaquer au problème des « subprimes », des créances hypothécaires et de redynamiser le marché immobilier. Je note que, dans les faits, cette annonce de la Fed n'a soulagé les marchés que durant deux jours. Avant qu'ils ne rechutent par la suite du fait d'une baisse de la production industrielle aux Etats-Unis.
Pour le cas européen, la crise financière a pris des proportions telles qu'il est difficile aujourd'hui d'envisager un retour de la croissance. Il faudra d'abord résoudre le problème de la Grèce et de l'Espagne. Aujourd'hui, il y a un réel danger d'assèchement du crédit en Europe. Quoi qu'il en soit, l'année 2012 est d'ores et déjà une année perdue pour l'Europe.
La BCE a seulement annoncé qu'elle allait acheter des titres d'Etat sur le marché secondaire. Il reste désormais à mettre en oeuvre ce programme. Si tel était le cas, elle pourrait alléger la contrainte financière de certains pays de la zone euro par une baisse des taux d'intérêt souverains.
Mais je constate qu'il reste beaucoup d'étapes à franchir pour arriver à cette mise en oeuvre. Il faut réaliser la supervision bancaire, mettre en place le Mécanisme européen de stabilité (MES)... Et c'est un réel problème. Car je pense que l'Allemagne n'est pas particulièrement intéressée pour que cette mesure entre en vigueur rapidement, en raison de sa situation politique intérieure.
Nous en sommes au stade des promesses en Europe. Trop peu a été fait et trop tard. Je crains que, d'ici à quelques mois, nous en serons encore à discuter quand seront mis en oeuvre ces mesures. Dans les faits, la BCE devrait faire ce que la Fed a fait au début de la crise financière : donner les liquidités nécessaires. Beaucoup de pays européens éprouvent des difficultés à lever des fonds sur les marchés obligataires. Pour pouvoir bénéficier des achats de titres d'Etat par le futur MES, des conditions budgétaires et fiscales très rigides ont été instaurées. Il y a donc un déséquilibre entre la politique monétaire et budgétaire en Europe.
Il faut en même temps mettre en place des mesures monétaires et créer un grand instrument d'investissement dans les infrastructures pour retrouver de la croissance. C'est ce que nous avons fait au Brésil. Le gouvernement français est sensible à ce type d'initiative avec son projet de banque publique d'investissement. C'est une bonne solution. Il faut le faire au niveau européen.
Il est faux de dire que le Brésil a pris beaucoup de mesures protectionnistes. Quelques-unes ont été effectivement prises. Le Brésil n'est pas plus protectionniste que la France, l'Allemagne ou le Royaume-Uni. A la différence des Etats-Unis, de la Chine, de la Russie ou de l'Inde, si l'on se réfère à l'étude de « Global Trade Alert ». Selon moi, la manipulation des taux de change qui sape la concurrence saine et loyale, en vigueur dans certains pays, est certainement la forme de protectionnisme la plus néfaste.
Nous avons beaucoup souffert de la dévaluation du billet vert au cours de ces cinq dernières années. Ce qui nous a conduits à prendre des mesures pour nous protéger. La dépréciation du billet vert va faire perdre de l'argent au Brésil dont une partie importante des réserves est en dollars. Nous continuerons donc à prendre des mesures pour maintenir le real dévalué. J'ajoute à cela que nous avons dû faire face à une arrivée massive sur notre marché de produits à bas prix résultant de politiques de subvention et de manipulation de la valeur de la monnaie.
Mais, d'une manière générale, au sein du G20, notre position est contre l'adoption de mesures restreignant les marchés mondiaux, le commerce. Enfin, nous avons subi pendant de nombreuses années un déficit de notre balance courante, ce qui est la preuve indubitable que le Brésil ne s'adonne pas à un protectionnisme généralisé.
En 2009, la coopération était plus forte dans le G20. Nous avons travaillé ensemble et nous avons eu plus de résultats. Fin 2009, l'industrie mondiale s'était redressée et la croissance mondiale était repartie l'année suivante. Car la coopération était là. La Fed a été plus rapide que la BCE dans la mise en oeuvre de mesures pour résoudre la crise financière de l'époque. Maintenant, cela fait deux ans que nous essayons de résoudre le problème européen, de la Grèce en particulier. Si nous avions réussi à prendre le problème dès le départ, en 2010, comme le suggérait le FMI, nous n'en serions pas là, avec une détérioration de la confiance en Europe et une dégradation de la situation des banques.
Je ne suis pas sûr que cette réforme sera achevée le mois prochain. Les Etats-Unis et certains pays européens n'ont toujours pas ratifié ce texte. J'ai abordé ce sujet lors de mon entrevue avec mon homologue français, Pierre Moscovici, pour que ces pays européens approuvent cette réforme donnant plus de poids aux pays émergents. Il faut que les pays européens respectent leur parole.
A l'avenir, la formule de calcul des quotes-parts doit évoluer. Les pays du G20 sont d'accord pour aboutir en 2014. Nous défendons l'importance plus grande du PIB en parité de pouvoir d'achat dans la nouvelle formule qui doit être élaborée, tout en réduisant le poids d'autres variables, comme le niveau de commerce par exemple. Dès lors, le Brésil devrait avoir une augmentation de son poids au sein de l'institution multilatérale. Mais je note, d'une manière générale, que les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) sont encore sous représentés au FMI.
Les négociations sont longues. Nous poursuivons les discussions. Il est difficile de négocier entre deux blocs économiques de cette importance. Les difficultés viennent des deux côtés.