La recherche publique franaise souffre! Elle souffre de trop de complexit, de trop de papiers remplir, de trop peu de temps consacrer la recherche elle-mme. Une fois n’est pas coutume: l’Acadmie des sciences vient de jeter un gros pav dans la mare, en publiant deux mois des Assises nationales de la recherche organise par le ministre du mme nom un vritable brlot.

Le rapport, sobrement intitul Remarques et propositions sur les structures de la recherche publique en France, numre en dix points tout ce qui cloche aussi bien dans les universits que dans les grands organismes publics (CNRS, Inserm…) et propose sur chacun d’eux des amliorations ou modifications profondes raliser en urgence.

Principale cible des acadmiciens, qui ont vot ce document en sance plnire l’unanimit des 170 membres prsents: la bureaucratie et l’administration dont l’inflation continue depuis plus d’un demi-sicle asphyxie littralement la recherche publique.

Le groupe de travail de l’Acadmie, prsid par le Pr Bernard Meunier, rvle ainsi qu’au CNRS, le ratio entre la masse salariale et la dotation annuelle de l’tat est pass de 47% en 1960, 84% en 2010. Soit un quasi-doublement!

Hausse des emplois administratifs

Problme: cet accroissement s’est surtout traduit par une hausse vertigineuse des emplois administratifs plutt que de techniciens ou de chercheurs. En 2010, les services centraux du CNRS employaient 879 agents contre 104 cinquante ans plus tt. Autrement dit neuf fois plus alors que, sur la mme priode, le nombre de chercheurs tait multipli par quatre. La tendance est grosso modo la mme dans les autres organismes de recherche et les universits mme si les acadmiciens n’ont pas pu obtenir de chiffres prcis.

Au bout du compte, il ne reste pratiquement plus rien distribuer aux quipes de recherches lesquelles, note le rapport, sont devenues uniquement dpendantes des appels projets manant de la Commission europenne, de l’Agence nationale de la recherche (ANR) ou d’industriels et non plus les moyens d’initier des travaux originaux de recherche fondamentale. En outre, chercheurs et directeurs de laboratoire passent le plus clair de leur temps rechercher des crdits au lieu de faire leur travail qui consiste produire des connaissances si possibles nouvelles ou fort potentiel innovant.

Contraintes budgtaires

Pour remettre de l’argent dans les laboratoires, l’Acadmie des sciences propose de ramener progressivement ce rapport MS/DE 60-65% de faon assurer un quilibre entre la masse salariale et les crdits de fonctionnement et d’quipement (il est de 65 70% dans les instituts Max Planck, quivalent allemand du CNRS).

Dans une priode de contraintes budgtaires, nous tenons souligner que nos propositions de simplification et d’arrt de la complication des procdures administratives sont une excellente manire de redployer, volume constant, des moyens financiers vers les laboratoires et les quipes de recherche, peut-on lire dans le rapport.

En clair cela ne coterait pas un euro de plus l’tat. D’autant que la recherche publique franaise, qui a absorb 0,78% du PIB en 2010, n’est pas moins bien lotie qu’ l’tranger: 0,79% en Allemagne, 0,67% en Grande-Bretagne, 0,76% aux tats-Unis et 0,74% au Japon.

valuations rigoureuses

Les fonds librs par ce dgraissage devront aller prioritairement vers les chercheurs les plus cratifs, en s’appuyant sur des valuations rigoureuses. Sans revenir au statu quo ante, avec des commissions composes 50% de reprsentants syndicaux, les Acadmiciens recommandent au gouvernement de supprimer l’Agence d’valuation de la recherche et de l’enseignement suprieur (AERES) cre sous la prsidence de Jacques Chirac, et qui fait la quasi-unanimit contre elle. sa place, le rapport propose d’instaurer des structures d’valuation dpendant directement des universits et des organismes de recherche qui auraient la charge de constituer des comits d’valuation indpendants, faisant appel des experts nationaux et internationaux reconnus.

L’Acadmie recommande galement de remplacer les trois conseils existants (Haut Conseil, CSRT et Cneser) par un seul haut conseil de la recherche et de l’enseignement suprieur, prsid par un scientifique de haut niveau entour de personnalits scientifiques reconnues sur le plan international. Cette instance trois en un, aurait pour mission d’valuer les grandes structures (universits, organismes,…), d’tablir des directives sur les procdures d’valuation des laboratoires et de prendre en charge les grands arbitrages entre les diffrentes disciplines scientifiques.

Enfin le rapport suggre d’amliorer l’attractivit des mtiers de la recherche au travers, notamment d’une revalorisation des rmunrations des jeunes chercheurs.