Le rapport Gallois prônerait un choc de compétitivité d'au moins 30 milliards d'euros mais le gouvernement et le président de la République ont déjà annoncé qu'ils ne se sentaient pas liés par ses préconisations. Un deuxième rapport a été commandé au haut conseil du financement de la protection sociale... mais il n'est pas attendu avant janvier. Pour retrouver des marges de manoeuvre, les industriels vont devoir se débrouiller seuls...
La compétitivité n’est plus une affaire d’État. Depuis que le Premier ministre a décidé de transformer le choc en trajectoire, depuis que le président de la République a dit qu’il ne sentait pas lié par les conclusions du rapport Gallois, les industriels ont compris qu’il n’y aurait pas de transfert massif de charges du travail vers la consommation. Le financement de la protection sociale restera encore majoritairement assuré par les entreprises et les salariés pour préserver le sacro-saint pouvoir d’achat des Français…
On pourrait se lamenter, manifester, hurler au scandale mais tout cela serait vain. Mieux vaut analyser froidement la situation et se dire qu’une fois de plus, les industriels ne pourront compter que sur eux-mêmes pour retrouver des marges de manœuvre. En matière de compétitivité comme de plans sociaux, l’État ne peut pas tout. C’est donc à chacun de se prendre en main.
Et, pour l’industrie, cela peut se faire au niveau de chaque usine, de chaque centre de R&D, de chaque établissement ou de chaque groupe. C’est à cette échelle locale que les points de compétitivité qui manquent peuvent se gagner. Il faut s’inspirer en cela de l’usine PSA de Sevelnord. Ce site de production a réussi à remporter une nouvelle fabrication (et à assurer son avenir) en concluant un pacte avec ses salariés : ces derniers acceptaient de travailler un peu plus contre l’assurance de décrocher des investissements et l’industrialisation d’un nouvel utilitaire.
UN SEUL GRAND ACCORD-CADRE NATIONAL POUR TOUT RÉGLER ?
Cette démarche pragmatique et consensuelle est la meilleure qui soit. C’est d’ailleurs celle que veut adopter Renault à l’échelle du groupe. Lors des Assises de l’Industrie organisées par L’Usine Nouvelle, Carlos Tavares, son directeur général, a rappelé qu’il tendait la main à ses salariés pour trouver ensemble les solutions qui permettront aux usines françaises de redevenir compétitives. De l’État, il n’attend rien… Et, après tout, c’est peut-être mieux ainsi.
Comment en effet, peut-on espérer régler tous les problèmes de compétitivité avec un seul grand accord-cadre national ? Sur le terrain, il y a autant de handicaps à combler que d’entreprises. Prenez ce fabricant de compresseurs sur-mesure, qui exporte 90 % de sa production, son problème, ce n’est pas le coût du travail mais les pénuries de compétences.
Pour ce sous-traitant de l’automobile très peu automatisé, l’urgence, c’est d’alléger le poste salaires en tentant de renégocier sur les 35 heures. Pour ce grand groupe, réalisant 8 milliards d’euros de chiffre d’affaires et employant des milliers de personnes, le sujet c’est la flexibilité de son organisation qui pourrait vite devenir un grand paquebot ingouvernable.
Bref, chacun trouvera ses solutions en fonction de ses réalités… Et se dira que la compétitivité n’est jamais aussi bonne (et efficace) que quand elle est faite maison !