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Les Français sont nuls en économie: est-ce la faute des profs?

14/11/2012

 

 

Créé le 08-11-2012 à 06h05 - Mis à jour le 13-11-2012 à 18h13

ENQUETE Le système éducatif français peine à traiter d'économie de façon dépassionnée et à présenter l'entrepreneuriat comme une chance. Comment en est-on arrivé là ?

 
 
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En France, les professeurs se refusent à encenser ou non l'entreprise comme à la faire aimer ou pas. Ils entendent donner une culture économique "citoyenne", laissant l'enseignement de l'entreprise aux écoles de commerce. (SIPA)

En France, les professeurs se refusent à encenser ou non l'entreprise comme à la faire aimer ou pas. Ils entendent donner une culture économique "citoyenne", laissant l'enseignement de l'entreprise aux écoles de commerce. (SIPA)
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Au lycée Hoche de Versailles, Louis Haincourt est élève en terminale ES (sciences économiques et sociales). Dans la journée, il assiste sagement aux cours. La nuit, il expédie des coques de téléphones portables commandées sur son site. "Le plus jeune entrepreneur de France" a eu les honneurs de TF1, France 2, BFM... Car Louis Haincourt est un oiseau très rare. Les sondages se succèdent et se ressemblent: un jeune Français sur trois rêve de devenir fonctionnaire. L'Hexagone manque d'entrepreneurs.

Les sociétés de 250 à 1.000 salariés sont deux fois moins nombreuses en France qu'au Royaume-Uni, et trois fois moins nombreuses qu'en Allemagne, selon une étude d'Ernst & Young commandée par le Medef. Parmi les causes dénoncées dans ce rapport, une absence de culture de l'entrepreneuriat tout au long des cycles scolaire et universitaire.

"La France est un des pays les plus analphabètes en économie", tonnait Henri Lachmann le 13 septembre au Havre, lors du LH Forum. Pour le président du conseil de surveillance de Schneider Electric, c'est, bien sûr, la faute du système éducatif. La preuve? "L'administration a intitulé «rapport d'étonnement» le compte rendu que doivent faire les professeurs d'économie de seconde lorsqu'ils sont accueillis dans des entreprises."

Ce qui donne une idée du fossé qui sépare les deux mondes. Le ministre de l'Education, Vincent Peillon, conscient du problème, veut que les élèves, mais aussi les enseignants, soient "au contact avec le monde de l'entreprise".

 

Un problème maintes fois abordé, jamais résolu

 

Les missions sur le sujet se sont succédé. En mars 2007, le Conseil pour la diffusion de la culture économique, créé par Thierry Breton, alors à Bercy, et présidé par Claude Perdriel (propriétaire deChallenges), regrettait que l'économie ne soit "enseignée qu'à moins de la moitié des lycéens. Or on a peur de ce qu'on ne connaît pas". Au printemps 2008, la commission Guesnerie critiquait le caractère encyclopédique des programmes et se montrait sévère à propos des manuels. En juin 2008, l'Académie des sciences morales et politiques tranchait dans un rapport sur l'économie au lycée: "Les programmes ne permettent pas d 'acquérir le savoir de base dans ce domaine." 

Les travaux de l'Institut de l'entreprise, aiguillonnés par Michel Pébereau, vont dans le même sens. Dernier en date à s'être penché sur la question: Jérôme Dedeyan, chroniqueur sur BFM Business, patron du courtier en épargne salariale Debory Eres et membre de l'Association progrès du management (APM), a épluché les manuels français et étrangers. Résultat, selon lui: une approche de l'entreprise privée "au mieux défavorable, au pire biaisée et destructrice", même si "beaucoup de professeurs se donnent du mal pour corriger le tir".

Le débat est maintenant incontournable. Depuis 2010, les programmes ont été revus et, surtout, l'économie est devenue obligatoire en seconde. Alors, les Français sont-ils nuls en économie? Ou manipulés? Deux visions du monde s'affrontent. Celle des entrepreneurs et celle de l'Association des professeurs de sciences économiques et sociales (Apses), qui représente un enseignant de SES sur quatre. Pour se remettre les idées en place face à ces débats franco-français, il est également bon d'aller faire un tour à l'étranger.

 

La responsabilité des manuels qui servent de support aux cours

 

Le banquier Michel Pébereau a fait du manuel Hatier de première, édition 2008, une star. Les mécanismes du marché y étaient illustrés par un tableau du peintre Jean-Léon Gérôme, Le Marché aux esclaves... Suivait une image de prostituées, tandis qu'un exercice proposait de se pencher sur le marché de la cocaïne. Cette mise à l'index a fait florès dans les milieux patronaux, qui dénoncent une vision cryptomarxiste des manuels en France. "Les chefs d'entreprise sympathiques sont rares dans nos manuels", regrette Jérôme Dedeyan, qui constate qu'ils sont le sujet de dessins humoristiques, toujours sous un jour défavorable. Sur 80 auteurs cités chez Bordas et Belin, selon son décompte personnel, 65% sont marxistes.

Autre pointage, les citations de presse. Chez Bordas, on trouve 40 % d'Alternatives économiques, 40 % d'articles du Monde, deux fois La Tribune, une fois L'Expansion, jamais Challenges ou Capital... Chez Belin, on oppose les contraires. "Plage privée à Saint-Tropez versus plage publique à Biarritz", "cours particulier de golf contre cours collectif de kick-boxing », "montre à 7 euros contre Rolex à 85.000 euros". L'Apses répond à ces critiques par d'autres statistiques, qui montrent la diversité des sources dans les manuels et le poids des organismes tels que l'Insee, l'Ined, le Sénat ou les universités.

Le débat a aussi cours en Allemagne. "Les libéraux reprochent au système actuel d'enseignement de l'économie de négliger le chef d 'entreprise et son point de vue, de noyer l'entreprise dans des considérations plus vastes, et de ne pas suffisamment parler de ses fonctions, de ses difficultés", témoigne Werner Zettelmeier, chargé de recherches au Centre d'information et de recherche sur l'Allemagne contemporaine (Cirac), spécialiste de la comparaison des systèmes éducatifs de la France et de l'Allemagne. Marjorie Galy, présidente de l'Apses, réplique que l'enseignement de l'économie n'a pas pour but de donner telle ou telle image du chef d'entreprise, ni même de créer des vocations: "C'est comme si des industriels se saisissaient des programmes de chimie et disaient: « Ils ne font pas de la chimie comme nous et ils ne créent pas de vocations»."

 

Approche sociologique ou scientifique ?

 

En Suisse, dans le canton de Vaud, parmi les trois livres recommandés pour l'option économie et droit en classe de maturité, en fi n de secondaire, on trouve L'Economie expliquée à ma fille, d'André Fourçans (éd. Seuil). Un livre éreinté par Alternatives économiques. Le magazine, bible des enseignants en économie en France, stigmatise sa "forte inspiration libérale" et une approche "pseudo-scientifique". C'est peut-être sur la façon d'aborder l'économie que les débats sont le plus vifs: d'un côté les tenants d'une approche sociologique et macroéconomique, de l'autre ceux qui préfèrent la vision scientifique de la microéconomie.

"La microéconomie est une science, il n'y a rien d'idéologique là-dedans: c'est cela qu'il faut enseigner", martelait Michel Pébereau aux lycéens de Turgot à Paris le 7 avril 2011, lors d'un cours organisé par Challenges et l'enseignant Pierre-Pascal Boulanger. Jérôme Dedeyan nuance: "L'approche sociologique est très riche, mais nécessite la maîtrise des concepts de base. Or il n'y a pas eu d'apprentissage du fonctionnement des entreprises et de leur utilité pour le pays." Du coup, on mâche le travail à l'élève, on lui donne du "quasi prépensé par des gens qui ont un prisme idéologique marqué".

Les professeurs membres de l'Apses tiennent à associer l'économie à la sociologie, la science politique ou l'anthropologie: ils veulent former des citoyens, pas des businessmen. Dans une lettre ouverte aux candidats à l'élection présidentielle, l'Apses lançait le 16 avril 2012: "Les lycéens, citoyens en devenir, sont plus que jamais demandeurs d'éléments d'explication sur les tenants et les aboutissants de la crise économique et financière, sur les débats relatifs aux solidarités ou aux mutations des liens de parenté, aux réformes de la protection sociale ou de la fiscalité." L'entreprise n'est qu'un élément d'un ensemble très vaste.

En Allemagne, dans les filières généralistes, les élèves démarrent l'économie dès la troisième. "Dans la quasi totalité des Länder, l'enseignement de l'économie puise dans plusieurs disciplines universitaires, explique Werner Zettelmeier. Sociologie, droit, histoire, sciences politiques... C'est une démarche interdisciplinaire." Mais le pays n'échappe pas, comme la France, à une vive polémique lancée par les partisans d'une économie délestée des questions de société.

 

L'Etat, un acteur économique omniprésent en France

 

La France est le pays de Colbert. L'Etat est omniprésent dans les manuels. Dans le livre de seconde édité par Nathan, pris au hasard, on trouve l'extrait d'un rapport du Sénat sur "le rôle de l'Etat dans la lutte contre la pauvreté". Cette lutte est aussi celle du secteur associatif, le Secours populaire, les Restos du coeur et Emmaüs. Les créateurs d'emplois, eux, n'y ont pas leur place. On peut y lire un encadré sur la contribution à l'audiovisuel public et la redevance, mais rien sur l'économie de TF1, M6 ou Canal Plus, pourtant bien connues des élèves.

Un chapitre entier est consacré au rôle économique de l'Etat: encadrement du marché du travail, régulation. Il faut attendre la page 50 pour trouver une seconde partie où sont abordés: décisions de l'entreprise, entrepreneur, marché, coûts, valeur ajoutée, concurrence, prix et rémunération.

L'approche est différente en Allemagne. "Le rôle de l'Etat entre dans la description de l'économie de marché, il fait partie des acteurs", explique Werner Zettelmeier. Les jeunes Allemands apprennent qu'il a un rôle social, notamment dans le marché du travail. Mais qu'il garantit aussi le libéralisme, la concurrence ou la liberté contractuelle. Attention, "en Allemagne, l'Etat, c'est aussi les Länder. Surtout, l'Etat stratège, central en France, les Allemands ne l'ont pas".

 

Le patriotisme économique est bien plus à l'honneur en Allemagne

 

Dans sa partie consacrée à l'entreprise, le manuel Nathan prend pour exemples Subway, Coca-Cola, Mezzo di Pasta, McDonald's, Apple... Les entreprises étrangères se taillent la part du lion. Du côté de la France, le manuel se penche longuement sur les sociétés à statut coopératif, "des entreprises originales", dont les salariés sont associés majoritaires. On voit aussi, en fin de programme, une flopée de champions de l'export en France: Peugeot, l'huile d'olive de Provence, le pâté Hénaff, la moutarde Fallot ou la limonade artisanale Lorina.

On est loin des Etats-Unis, où les manuels insistent sur l'entreprise bienfaitrice et sur sa contribution à la richesse nationale. Quant à l'Allemagne, les élèves y sont biberonnés à l'industrie, et doivent savoir ce que chaque secteur d'activité (chimie, métallurgie...) apporte au pays, comment il contribue à l'excédent de la balance commerciale. Un manuel revient sur les sacrifices considérables consentis par la population dans les années 1990, notamment en termes de salaires, pour réussir l'unité nationale. "L'Allemagne est très fière de sa production industrielle, confirme Werner Zettelmeier. Il y a un consensus dans les manuels sur les atouts du pays par rapport à ses voisins, sur ses entreprises, ses réussites, et sur l'intérêt de la nation à compter des entreprises florissantes qui font profiter les salariés de leur dynamisme."

Alors, antipatriotiques, les manuels français? "Nous nous appuyons sur les marques que les élèves connaissent le mieux, celles sur lesquelles nous avons des informations, explique Marjorie Galy. Apple, les enfants en entendent parler à la radio. Nous sommes aussi l'écho de ce qui se dit dans les médias." Et pourquoi citer forcément des entreprises françaises? "Il n'y a pas d'intention maligne, mais ce n'est pas dans nos préoccupations. Nous n'y pensons pas", reconnaît la présidente de l'Apses.

 

L'entrepreneuriat érigé en modèle partout sauf en France

 

"Des attitudes entrepreneuriales telles que l'esprit d'équipe et d'initiative, la persévérance, la créativité, le sens des responsabilités, la confiance en soi, nous en avons tous en nous." Ce bel encouragement adressé aux élèves ne vient pas du Medef. On peut le lire en préface d'une bande dessinée, Antoine et Laura créent leur entreprise, éditée chez Sydo. Initialement publié en France, cet outil "de sensibilisation et d'encouragement à la création d'entreprise" a séduit... les écoles de Belgique. Les aventures d'Antoine et Laura embarqués dans la création de leur marque de sport ont été adaptées pour la Wallonie avec des fonds européens, et distribuées en novembre 2010 dans toutes les classes de troisième année secondaire. Emblématique.

En Allemagne, dans la plupart des manuels, l'entrepreneuriat fait l'objet d'un chapitre spécifique. L'élève de seconde peut faire un petit test pour savoir s'il a bien les qualités pour devenir entrepreneur. On lui fait réaliser un business plan et on travaille sur la manière de faire grandir son entreprise, par croissance externe, sur fonds propres... Aux Etats-Unis, l'entrepreneuriat - ce n'est pas une surprise - est aussi célébré. Dans un livre destiné aux professeurs américains, Whatever Happened to Penny Candy?, on relève des titres de chapitres inimaginables en France: "Le gouvernement est financé par les impôts", "L'épargne finance les entreprises" ou "Le pouvoir de la capitalisation".

En France, rien sur "le bonheur de créer des emplois, du lien social, rien sur la fierté d'embaucher quelqu'un, déplore Jérôme Dedeyan. Si après être passé par là, il reste des vocations d'entrepreneur, c'est miraculeux". De son côté, l'Apses, répondant aux attaques du think tank libéral Ifrap, dénonçait dans un communiqué en avril dernier une manipulation: "On isole la partie qui pose problème à certains patrons et on en fait le tout afin d'alerter l 'opinion [ ...]. Cette opinion à charge n 'a qu'un seul objectif: légitimer la demande que les programmes scolaires soient coécrits par les chefs d'entreprise et leurs organisations représentatives afin de réenchanter l'entreprise." Les professeurs se refusent à encenser ou non l'entreprise comme à la faire aimer ou pas. Ils entendent donner une culture économique "citoyenne", laissant l'enseignement de l'entreprise aux écoles de commerce.

 

Les entreprises toujours pas les bienvenues dans les classes

 

La Fondation Total intervenant ès qualités dans toutes les classes de France? Gageons que l'initiative créerait des remous. Rien de tel en Allemagne, où la Fondation Bosch, par exemple, est très présente dans l'univers scolaire. Outre-Rhin, l'entreprise pénètre sans difficulté l'enceinte de l'école pour intervenir dans les classes. "Cela se fait très couramment depuis plus de vingt ans",assure Werner Zettelmeier. Dans le secondaire, les professeurs font appel à des patrons implantés dans leur Land, ou organisent des visites d'entreprises. De la même façon, des contacts étroits et concrets sont liés avec d'autres acteurs économiques, tels les syndicats, les représentants des chambres de commerce locales ou du Pôle emploi allemand. En fait, une grande autonomie est laissée aux établissements et aux enseignants, qui organisent ces conférences ou visites à leur guise et selon leurs réseaux. Les cercles proches du patronat proposent, quant à eux, des concours régionaux ou nationaux pour mettre en place des Junior-Entreprises. On fait témoigner les parents d'élèves. Mais attention, le professeur garde la main: à lui de préparer, analyser, décrypter, discuter, nuancer et mettre en perspective les discours des intervenants extérieurs avec ses élèves.

En France, certains professeurs organisent des rencontres avec des patrons, mais la démarche est loin d'être générale. Les deux mondes restent cloisonnés, même si des associations, comme l'Institut de l'entreprise ou encore 100.000 Entrepreneurs, de Philippe Hayat, multiplient les passerelles avec succès. L'avenir est sans doute là, dans ces rencontres et ces initiatives qui séduisent des professeurs de plus en plus nombreux autour de thématiques dépassionnées.

http://www.challenges.fr/economie/20121108.CHA2815/les-francais-sont-nuls-en-economie-est-ce-la-faute-des-profs.html


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