Encore méconnues il y a peu, les Scop (Sociétés coopératives et participatives) sont passées sous les feux de l'actualité avec des dossiers comme SeaFrance ou Fralib. Elles sont à nouveau à l'affiche en organisant un congrès à Marseille (qui se tient jusque ce vendredi 16 novembre) et où Benoît Hamon est venu les soutenir.
Ces sociétés ont pour particularité d'impliquer fortement les salariés, ces derniers détenant au moins 51 % du capital social et 65% des droits de vote. Elles proposent également une gouvernance dite "démocratique", chaque associé disposant d'une voix lors de l'assemblée générale, quelle que soit la part du capital détenue. Depuis 2008 -date du dernier congrès- leur nombre a progressé de 9%: elles sont désormais 1.910, regroupant 40.734 personnes, pour un chiffre d'affaires de 3,7 milliards d'euros, selon la Confédération générale des Scop (CG Scop). Elles sont particulièrement présentes dans les métiers de services (42% des Scop), mais également dans le bâtiment (30%) et dans l'industrie (20%). "Les Scop contribuent à favoriser l'emploi et par conséquent à lutter contre le chômage en créant des entreprises, indique Patrick Lenancker, président de la Confédération générale des Scop (CG Scop). On en compte des dizaines par an, qui se répartissent selon le schéma suivant : 7 Scop/10 sont des créations pures, 2/10, des transformations d'entreprises ou d'associations en Scop et 1/10 des reprises d'entreprises en difficulté".
Alors que la loi relative à la simplification du droit (22 mars 2012) devrait permettre l’amélioration du fonctionnement et le renforcement de l’attractivité des Scop et des Scic (Sociétés coopératives d’intérêt collectif), ces dernières sont particulièrement attentives au projet de loi sur l’Economie sociale et solidaire annoncé par le ministère éponyme de Benoît Hamon. Et les acteurs souhaitent une évolution du cadre législatif de manière à promouvoir les Scop. Patrick Lenancker en dit plus sur ses attentes et ses propositions.
Quelles solutions innovantes présentez-vous au congrès de Marseille ?
Nous en proposons plusieurs et nous avons privilégié celles qui s'inscrivent dans le projet de loi d'Economie sociale et solidaire.
• Tout d'abord, nous souhaiterions la création d'un droit préférentiel de reprise d'entreprise par les salariés. Trop de PME sont menacées de disparaître faute de repreneur, quand le gérant atteint la limite d'âge. Il faut anticiper ces situations, notamment en informant les salariés et le cédant que des solutions existent. A l'heure actuelle, rien n'interdit aux salariés de reprendre l'entreprise en passe d'être vendue, mais dans les faits ça n'arrive jamais. Un tel droit préférentiel ne serait donc pas prévu pour autoriser les choses, mais bien pour les favoriser et ainsi éviter de voir des entreprises mourir. Cela serait d'autant plus bénéfique pour les sociétés de moins de 50 personnes qui ne possèdent pas toujours d'institutions représentatives du personnel et où, par conséquent, l'information est souvent moins bien diffusée. Cela permettrait de sensibiliser les salariés et les patrons à la solution de la Scop. L'idée serait ainsi de faire que la loi créée une sorte de devoir d'anticipation.
• Autre proposition que nous formulons : la possibilité de créer des groupes coopératifs dont les entités sont également coopératives. En clair, faire en sorte que les filiales de la Scop mère soient également considérées comme des Scop. Et cela nécessite quelques petits réglages juridiques.
• Nous voulons également la création d'un statut transitoire de coopératives de salariés associés.
Justement, à quoi correspond le nouveau statut transitoire de coopérative de salariés associés ?
Il serait très utile pour les grosses PME et les entreprises de taille intermédiaire qui ont des tours de table de plusieurs milliers d'euros. En effet, on ne peut pas demander aux salariés de se débrouiller seuls pour trouver de telles sommes. C'est pourquoi nous proposons de contourner le problème en permettant à d'autres structures (comme par exemple, les fonds d'investissements régionaux, etc) de racheter l'entreprise et de revendre ses parts au fur et à mesure aux salariés. Au départ, ils seraient donc minoritaires, mais dès que le seuil des 50% est dépassé la structure devient une Scop. Entre temps, les employés ont eu du temps pour se former et entrer dans une logique de co-entrepreneurs.
En quoi les Scop sont-elles des solutions aux dérives du capitalisme financier ?
C'est très simple, le capitalisme financier repose sur deux fondements : la concentration des moyens financiers et la spéculation. Or nous constatons en ce moment les effets nocifs que peuvent avoir ces deux éléments sur l'économie. Notre modèle est, quant à lui, complètement inverse. Il est basé sur la déconcentration et la répartition du capital au plus grand nombre des salariés. Et une partie des bénéfices est reversée aux salariés sous forme de participation, le reste étant bien entendu réservé à l'entreprise elle-même et à son développement.