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"L'industrie doit servir à créer des emplois"

30/8/2012







Publié le 
Jean-François Dehecq 
© Pascal Guitter - L'Usine Nouvelle

  Jean-François Dehecq, ex-PDG de Sanofi, préside la Conférence nationale de l'industrie. À l'occasion de la Semaine de l'industrie, qui s'ouvre lundi, ce grand patron nous livre son analyse personnelle. Elle est décoiffante.

L'Usine Nouvelle - L'industrie est au coeur du débat présidentiel, mais est-elle prise sérieusement en charge ?
Jean-François Dehecq - L'idée que l'industrie est fondamentale s'installe désormais dans les esprits. Le président de la République a fait des efforts considérables. Mais on est loin d'avoir rattrapé trente ans de "non-réflexes" industriels. Entre nous, le président Chirac, pour qui j'ai pourtant une grande estime et de l'amitié, n'avait pas beaucoup d'intérêt pour l'industrie. Depuis l'époque gaullienne et pompidolienne, rares sont les ministres de l'Industrie à s'être réellement investis. Peut-être Jean-Pierre Chevènement, qui a exercé cette fonction de 1981 à 1983. Christian Estrosi, plus récemment, a fait du bon travail. Mais nous avançons. Le but de la Conférence nationale de l'industrie (CNI), c'est que l'ensemble des parties, employeurs, partenaires sociaux, puisse s'exprimer. Ce qu'il faut, c'est créer des convergences sur ce sujet dans le pays. Ce qui est très compliqué, surtout en période électorale. Même si le rapport de la CNI n'est pas encore public, les textes ont déjà circulé dans l'entourage des candidats. Je remarque que certaines propositions issues des différents groupes de travail sortent dans les programmes des uns et des autres. J'en suis ravi car l'industrie, ce n'est ni de droite, ni de gauche ! Il y a cinq ans, personne n'en parlait. Aujourd'hui, avec la Conférence nationale de l'industrie, nous avons un organe de concertation permanent dont les membres sont nommés jusqu'en 2013. Nous ne sommes pas liés aux échéances électorales.

Et aujourd'hui ? Selon vous, qu'est-ce qui a avancé depuis deux ans ?
Après les états généraux de l'industrie, en mars 2010, le président de la République a annoncé 23 mesures. Beaucoup de choses ont été faites. Bien sûr, on peut regretter que certaines n'aient pas été mises en oeuvre plus tôt. Sur le concept de banque de l'industrie, il a fallu deux ans, c'est un peu long et sans doute la création d'Oséo Industrie, dotée de 1 milliard d'euros, est-elle encore insuffisante. Vous savez, les industriels ont besoin de flux, il leur faut de la trésorerie, c'est énorme surtout au moment où les délais de paiement s'allongent. Il faut en parler sérieusement et on ne peut pas le faire à toute vitesse. Maintenant, faut-il mettre tout cela dans un grand ensemble, comme le propose le candidat socialiste, où seraient fusionnés la Caisse des dépôts, Oséo, le Fonds stratégique d'investissement (FSI) ? Ce n'est pas évident. Il faudrait donner une sacrée latitude aux gens qui en sont à la tête. L'an passé, le gouvernement vous a demandé de vous pencher sur le sujet brûlant de la compétitivité.

Êtes-vous parvenu à un consensus ?
Cette demande n'était pas un cadeau pour la CNI. Car forcément, sur ce sujet, vous avez d'un côté les organisations patronales, qui se focalisent sur la compétitivité coût et réclament des baisses de charges ; de l'autre, les organisations syndicales, qui considèrent que les entreprises se feront plus de marge à bon compte. Mais nous avons avancé sur la question de la compétitivité hors coûts. Nous avons pu parler de questions clés comme la qualité, la supply chain et l'investissement qui a un retard colossal dans ce pays. Idem pour l'innovation. La France est une championne de la recherche, mais pas de l'innovation… Quiconque connaît l'industrie sait que l'innovation se fait près des usines, voire dans les usines. Croire que l'on peut supprimer la production en France, et y conserver la R & D, c'est ne rien comprendre à l'industrie ! Il faut aussi parler de l'export qui doit être celui des PME. Surtout, tout doit être "fléché" vers la création d'emplois. On ne peut pas se permettre de laisser 10 % de la population sans travail dans notre pays. Toutes ces questions nous ramènent d'ailleurs aux PME, car nos grandes entreprises ont perdu le contact avec le territoire.

Vous pensez que les grandes entreprises ne créent plus d'emploi ?
Oui. Je crois qu'il faut se sortir de la tête l'idée que ce sont les grandes entreprises qui vont tirer le pays vers le haut. Et c'est moi qui vous le dis, alors que j'ai bâti en vingt ans un géant mondial de la pharmacie. Moi, je suis d'une génération de patrons qui voulait que la France existe. En cas de problème, on cherchait des solutions, quelles qu'elles soient. J'ai même reconverti un site en usine de pizzas ! Ce n'est pas forcément le cas de la génération actuelle. Dans une petite entreprise, ce n'est pas facile pour le patron de virer des gens qu'il connaît tous personnellement. Du haut d'une tour de La Défense, c'est plus simple. Les patrons de grands groupes sont très mobilisés sur l'international. Il faut qu'ils aient des godasses sacrément tricolores - c'est mon cas - pour vouloir créer de l'emploi ici, payer des impôts en France. Nous les avons aidés pendant la crise, mais l'État n'est pas entré au capital, comme les Américains l'ont fait avec leurs constructeurs automobiles, par exemple. Je pense qu'il faut des aides plus conditionnées.

Il faut donc tout attendre des PME ?
Des PME, des filières et des régions. C'est pour cela que nous nous sommes organisés avec tous ces comités de filières. Le problème du papier, ce n'est pas celui du luxe. Si on veut agir sérieusement, il faut aller dans le détail. C'est pour cela que les propositions de la CNI ne feront pas la une des journaux, ce n'est pas du spectaculaire, c'est un travail en profondeur. Si le grand projet c'est l'emploi, on ne peut pas tout miser sur les hautes technologies et le numérique. Il faut aller sur les industries traditionnelles. Réfléchir à l'avenir de la filière agroalimentaire, reconstruire une filière bois. Rendez-vous compte que nous avons la plus grande forêt d'Europe et presque plus de scieries. On envoie les troncs en Allemagne, qui nous rend une planche sur dix. Nous faisons des copeaux pour du bois de chauffage mais sommes obligés d'en importer pour fabriquer des panneaux de particules. Quand vous travaillez filière par filière, les réponses sont extraordinairement opérationnelles.

Est-ce à l'État ou aux régions de prendre la main en matière industrielle ?
La ligne directrice doit être l'emploi. Il faut donc agir au niveau régional et même au niveau du bassin d'emploi. Au niveau de l'agglomération lyonnaise, il y en a au moins huit très différents. Aujourd'hui les grands patrons de région en font mille fois plus pour l'industrie que l'État. Le président de la régionAquitaine, Alain Rousset, ou son homologue de Bretagne, Jean-Yves Le Drian, savent ce qu'est l'industrie. D'ailleurs, ils montent de moins en moins à Paris. Au comité d'orientation du FSI, que je préside, je me bats pour que l'on intègre le critère de l'emploi dans les investissements. L'industrie doit surtout servir à créer des emplois.

Vive les PME ! À "L 'Usine Nouvelle", nous défendons l'idée toute l'année. Les politiques s'y intéressent surtout avant les échéances électorales…
En tout cas, avec la Conférence nationale de l'industrie, nous faisons avancer ces sujets. Je ne vais pas vous refaire le discours sur le manque d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France, que tout le monde connaît. Mais il faut agir. Financer et aider les filières à se structurer en regroupant des entreprises. C'est ce qu'essaie de faire le FSI. Certes, il ne faut pas se leurrer : mes amis décolleteurs de la vallée de l'Arve, qui sont formidables, ne sont pas forcément prêts à se regrouper. L'intérêt de la CNI, dont nous allons accentuer la régionalisation l'an prochain, c'est de permettre aux gens de se parler. Ils s'aperçoivent qu'ils ont les mêmes problèmes et doivent travailler ensemble, notamment à l'export. Un petit groupe d'entreprises de la région lyonnaise a ainsi ouvert un bureau commun de prospection à Singapour ; ils restent indépendants mais partagent bureau, téléphone, contacts. C'est plus efficace que de demander à des grands groupes français de les aider à l'étranger. Je le sais, je l'ai fait chez Sanofi.

Il existe des initiatives en la matière, notamment l'association Pacte PME.
C'est très bien. Il faut agir. Il ne suffit pas de signer des chartes. Il faut de la mutualisation inter-entreprises. Il faut des gens sur le terrain, avec des programmes concrets. Il y a des gens qui font un travail formidable : René Ricol, le Commissaire général à l'investissement, ou Jean-Claude Volot, avec la Médiation inter-entreprises et la mission d'internationalisation des PME.

Depuis que vous pilotez cette Conférence de l'industrie, on vous a finalement peu entendu. Pourquoi ?
Je préfère que l'on travaille plutôt que de s'exprimer à tout bout de champ. D'ailleurs, vous m'avez fait trop parler ! Faites lire nos recommandations ! Elles ne sont peut-être pas d'une originalité folle. Mais elles sont très importantes et il faut s'assurer qu'elles sont suivies. Quant à nous, nous allons continuer à travailler sur des thèmes majeurs : la formation et l'emploi, les aides publiques et leur efficacité réelle.

Propos recueillis par Anne-Sophie Bellaiche, Thibaut de Jaegher et Laurent Guez


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